Depuis janvier 2016, Erkki Maillard est le nouveau conseiller diplomatique du président-directeur général d’EDF, avec pour mission d’appuyer les métiers et les entités du Groupe auprès des acteurs diplomatiques.
NN : En quoi consiste votre nouvelle fonction de conseiller diplomatique auprès de Jean-Bernard Lévy ?
EM : Mon rôle est d’être le point focal entre le groupe et les acteurs publics : le Quai d’Orsay bien sûr, mais aussi l’Élysée, les ambassades et les gouvernements étrangers. Cette fonction existe dans plusieurs grandes entreprises sous des appellations diverses, mais que ce soit chez Total, Engie ou Thales, la mission centrale consiste à porter un message cohérent et coordonné vers l’extérieur et aussi à recueillir les questions, les données, les idées de la sphère publique pour le groupe. Le conseiller diplomatique est là pour soutenir concrètement les projets de l’entreprise, quand elle veut vendre un équipement ou une prestation.
L’existence de la fonction chez EDF est également liée au secteur d’activité. Dans l’énergie il y a une dimension politique très importante. Pour un gouvernement étranger, la sécurité d’approvisionnement et le prix de l’énergie sont des enjeux majeurs, avec pour conséquence une implication forte des acteurs publics. Mon rôle est d’intégrer cette donnée très en amont dans la construction de notre offre. Je suis là pour accompagner les équipes internes sur ces sujets, définir ce que peut faire le groupe en tenant compte des aspects juridiques, environnementaux et sociaux pour ensuite l’expliquer aux autorités, qu’elles soient françaises ou étrangères.
NN : Quelles sont les qualités nécessaires pour occuper un tel poste ?
EM : Il y a la connaissance des environnements internationaux et de la culture diplomatique, savoir par exemple comment se prépare un déplacement officiel. Il faut également une capacité à s’adapter aux différents contextes et interlocuteurs à l’intérieur du groupe, où il existe une diversité extraordinaire de métiers. Enfin, il faut une grande qualité d’écoute pour comprendre ce que demandent vos interlocuteurs.
NN : Qu’est ce qui vous a poussé à quitter la diplomatie pour un grand groupe comme EDF ?
EM : Tout d’abord le domaine de l’énergie ne m’était pas inconnu. C’est l’un des sujets que l’on rencontre le plus lorsque l’on est diplomate, un secteur avec une très forte dimension de politique internationale. J’ai passé à peu près quinze ans dans la diplomatie française à différents postes, en France comme à l’étranger, je trouvais intéressant de pouvoir me mettre au service d’un groupe, dans une perspective un peu différente, avec une vraie logique d’entreprise, tout en servant un fleuron de l’industrie française reconnu à l’étranger.
NN : Quelles différences faites-vous avec une mission diplomatique traditionnelle ?
EM : EDF n’agit pas à la place des personnalités publiques, mais l’expérience diplomatique est utile quand nous devons construire des projets en tenant compte des logiques politique et diplomatique. La différence majeure est que nous travaillons sur des projets concrets : des investissements, de l’export.
Pour ce qui est de nos relations avec l’État français, le plus important est que nous soyons mutuellement bien informés des objectifs des uns et des autres pour pouvoir avancer de façon coordonnée. Il n’y a pas de confusion des rôles mais il faut une cohérence dans les actions, liée à un intérêt commun.
NN : Pouvez-vous nous parler du projet stratégique Cap 2030, qui est à l’origine de votre arrivée ?
EM : Comme son nom l’indique, ce projet s’inscrit sur le long terme, il s’agit de voir loin et de viser haut. Il y a trois objectifs principaux dans ce plan : accompagner les clients et les différents territoires dans la transition énergétique. Produire une énergie à bas carbone, avec notamment le couple énergie renouvelable / énergie nucléaire qui est l’un des points forts d’EDF. Tous les pays qui ont entamé leur transition énergétique – l’Angleterre, la Chine, l’Inde – ont choisi d’allier nucléaire et énergies renouvelables. Car quand vous investissez beaucoup dans les énergies vertes, il faut gérer l’intermittence, il n’y a pas toujours de soleil, du vent, par contre vous avez toujours besoin d’électricité, ce que vous garantit le nucléaire.
Le dernier objectif, directement lié à mon poste, est de porter ces mesures à l’international. Je contribue à expliquer cette stratégie aux pouvoirs publics français, je leur présente le travail d’EDF sur les nouveaux usages : technologies numériques, réseaux intelligents, smart cities. Ce sont des savoir-faire que nous pouvons vendre partout dans le monde et il est important que nos pouvoirs publics – les ambassadeurs, nos ministres – aient conscience de la globalité de notre offre lorsqu’ils se déplacent à l’étranger.
NN : Quelle est votre dernière mission en date ?
EM : Le déplacement du président de la République en Inde, auquel Jean-Bernard Lévy a participé. Nous avons avancé sur le contrat des six EPR, créé une nouvelle joint-venture dans les énergies renouvelables et contribué à un projet de smart cities avec trois villes indiennes. C’est très cohérent avec la stratégie Cap 2030, puisque vous y trouvez à la fois le développement de l’énergie nucléaire, un engagement résolu sur les énergies renouvelables et le développement des nouveaux usages, tout cela dans un pays en pleine émergence.
Propos recueillis par David Rozec, drozec@nomination.fr