« N’ayez pas peur ! » pour paraphraser un célèbre pape polonais. En effet, il existe un écart entre les craintes et la réalité de l’IA. D’abord cantonnée aux laboratoires, l’intelligence artificielle ruisselle progressivement sur le monde entrepreneurial. Or, il s’agit d’une IA faible. Certes, en mesure de reconnaître des chatons parmi des milliards d’images ou de battre les meilleurs joueurs de Go mais incapable d’atteindre un raisonnement humain. « CHATBOT ! », s’exclameront certains. A l’échelle de la galaxie IA, un chatbot revient à aller sur orbite, quand l’IA forte vous promet d’atteindre Jupiter (n’y voyez aucun sous-entendu politique). Les forces commerciales ne s’y trompent pas. Suite à l’étude réalisée par Nomination dans le cadre de son livre blanc*, la majorité des directeurs commerciaux interrogés voient l’IA comme un moyen d’identifier des opportunités d’affaires, d’alléger le quotidien administratif et d’exploiter les bonnes informations au bon moment. Pas de remplacer les commerciaux…
On vend moins de centrales nucléaires que de bouquins sur Amazon
« N’ayez pas peur ! ». Car si la qualité de la data sert à nourrir l’IA, beaucoup d’entreprises ne possèdent pas un patrimoine d’informations suffisamment étoffé pour entrer en phase applicative. La donnée est le pétrole de l’économie du futur mais il est moins facile de la raffiner en B2B puisque les informations se révèlent basiques (chiffres d’affaires, secteur activité, effectifs…) ou trop éclatées durant le parcours d’achats. Faute de capteurs comportementaux : « En B2B, il n’existe pas de modèles globaux comme sur Netflix », explique Thierry Donneau-Golencer de chez Salesforce. Aujourd’hui la vente complexe échappe donc aux GAFA et BATX (son pendant chinois) qui pourtant nous connaissent mieux que quiconque, eux qui savent nous faire craquer pour un pull moche de Noël grâce à l’IA prédictive. « On vend moins de centrales nucléaires que de bouquins sur Amazon », selon la formule de Laurent Alexandre, l’énarque chirurgien, auteur de La guerre des intelligences. Contrairement à l’IA, l’homme réussit à prendre une décision avec peu d’informations. WWF peut respirer : le commercial en vente complexe ne sera pas une espèce en voie de disparition.
Energie-IA même combat !
« N’ayez pas peur ! ». Puisque l’IA ne représentera un avantage compétitif qu’à court terme (dix ans). D’après Thierry Donneau-Golencer, l’IA est le nouveau virage numérique à prendre pour les entreprises. Celles qui resteront à quai pour regarder le train partir n’y survivront pas. Sans doute êtes-vous trop jeunes pour vous en souvenir, mais quand la fée électrique faisait de Paris la ville Lumière à la fin du XIXe siècle, certaines entreprises s’électrifiaient elles-mêmes. Avant de sous-traiter ! Energie et IA même combat ! Lorsque l’immense majorité des entreprises aura accès au même pouvoir prédictif de l’IA, ce sera aux commerciaux de faire la différence. Que dites-vous ? Le quotient émotionnel ? Soyons réaliste…
Des bonus en millions de dollars
« N’ayez pas peur ! ». Car l’IA va donner la possibilité aux commerciaux de monter en gamme. L’irruption de l’IA va impacter l’organisation des forces commerciales. Si les relations de vente B2C seront totalement désintermédiées, le commercial B2B participera à la stratégie des sociétés qui l’emploient. Appréhendant la complexité de l’IA, frayant avec les GAFA, doté d’une intelligence conceptuelle et d’une compréhension des besoins de ces clients… Autant de qualités qui vont relancer la guerre des talents et faire émerger de nouveaux vendeurs d’élite. Cela fait dire à Laurent Alexandre que « ce genre de commercial gagnera de plus en plus. Certes cela va aggraver les inégalités mais nous aurons des stratèges commerciaux avec des bonus en millions de dollars ! ». Votre PEL a déjà le sourire.
Allier stratégie data et IA
« N’ayez pas peur ! ». Mais restez tout de même vigilant ! Parce que les GAFA ont déjà investi l’IA pour le B2C. Rien ne laisse présager que les mastodontes ne seront pas en capacité d’étendre leur modèle au business B2B. Avant de s’attaquer à la vente complexe sur certains segments dans quelques années. D’ailleurs, les géants du numériques ont tout pour eux : les entrepôts, la volumétrie, les externalités logistiques et d’usage. Tout cela leur donne un coup d’avance sur le reste du monde. Le risque ? « Une plateformisation qui vassaliserait les sociétés », estime Laurent Alexandre. Plus que jamais, il sera question d’allier stratégie data et IA au cœur des entreprises. Et oui, il n’y a que les GAFA qui ont une cuillère d’argent en bouche. Et vous, vous reprendrez bien une cuillère à soupe d’IA ?
Adrien Ares
*Données issues du livre blanc Nomination : Intelligence artificielle et business BtoB