Depuis 50 ans, les experts annoncent sans relâche la mort du vendeur B2B. Il aurait dû être emporté par chacune des vagues de nouvelles technologies connues ces dernières années : le télémarketing, les catalogues en ligne, les e-commerçants, les enchères en ligne inversées ou non, et plus récemment, la transformation digitale. Pourtant, il survit. Comment ? En s’adaptant.
Lorsqu’au printemps de cette année, le cabinet d’analyse Forrester Research publia une étude stipulant que, d’ici 2020, sur le seul territoire des Etats-Unis, 1 million de commerciaux B2B allaient perdre leur job, la profession n’y vit qu’une prédiction alarmiste de plus. Pourtant, cette fois-ci, l’émoi fut plus important que de coutume. Pourquoi ? Parce que le cabinet d’études américain désignait clairement le responsable de cette mise à la retraite prématurée : les automates de vente intégrés aux sites de commerce en ligne. Pour expliquer l’ampleur du phénomène, Forrester s’appuie sur une analyse des typologies de comportements d’achat des organisations. Les auteurs mettent en évidence 4 typologies de comportements d’achat liés au croisement de deux dimensions :
- Le degré de complexité de l’environnement client ;
- Le degré de complexité de l’offre proposée.
Comme indiqué dans le graphique ci-dessous, les clients peuvent être classés dans les 4 catégories suivantes :
- Le client aspirant à être servi (environnement simple, offre simple) ;
- Le client voulant voir l’offre du vendeur (environnement simple, offre complexe) ;
- Le client voulant être assisté dans la formalisation de ses transactions (environnement complexe, offre simple) ;
- Le client désireux d’être enchanté (environnement et offre complexes).
Forrester met alors en évidence le fait qu’à chacun de ces comportements types d’achat correspond un profil générique de vendeur :
- Environnement client simple et offre simple : le « preneur d’ordre »
- Environnement client simple et offre complexe : le « démonstrateur »
- Environnement client complexe et offre simple : le « navigateur »
- Environnement client complexe et offre complexe : le « conseiller »
Mais là où l’étude est passionnante, c’est lorsque Forrester Research met en évidence l’évolution des effectifs selon le profil des commerciaux :
- les « preneurs d’ordre » spécialisés dans une approche transactionnelle de la vente voient leur population décroître d’un 1/3 (-33%) ;
- les « démonstrateurs » voient leur population diminuer d’1/4 (-25%) ;
- les « navigateurs » perdent 15% de leurs effectifs ;
- à l’inverse de leurs camarades, les « conseillers » croissent en nombre de 10%.
Par suite, les résultats de cette étude mettent clairement en évidence l’impérieuse nécessité de faire évoluer la force de vente autour de compétences nouvelles. La vente entendue sous l’angle de la prise de commande va voir les automates de transaction prendre le pas sur l’interaction humaine. Pour autant, les vendeurs « conseillers », capables d’orienter le débat autour de la co-création de solutions originales, susceptibles de générer un incrément de valeur au bénéfice de leurs clients vont être de plus en plus appréciés par le marché. Ces vendeurs apportent ce que James A. Narus appelle, dans un article séminal publié dans la Harvard Business Review en 2014, « le petit plus » qui permet de faire la différence.