En cofondant Agriconomie, Paolin Pascot s’est donné pour objectif d’aider le monde agricole à gérer ses achats en toute transparence. Egalement président de la Ferme digitale, il revient pour Nomination sur le succès de son entreprise et l’avenir prometteur du e-commerce dans le monde agricole.
NN : Quelle est l’histoire d’Agriconomie ? PP : Agriconomie est une place de marché en ligne que j’ai créée en 2014 avec deux camarades, fils d’agriculteurs. Nous avons pu observer les difficultés de nos parents, oncles, cousins face à une distribution fermée, opaque qui les empêchait d’avoir accès aux prix, voire à certains produits. Nous voulions plus de transparence sur le marché des produits agricoles, c’est la raison principale de la création d’Agriconomie. Il ne s’agit pas de casser les circuits traditionnels, nous travaillons d’ailleurs avec certains de ces acteurs. Le propos est de redonner une certaine indépendance aux agriculteurs, de les aider à prendre les bonnes décisions pour leur entreprise. Ils avaient l’habitude de commander leurs produits sans en connaître le montant à payer, notre première action a donc été d’afficher le prix du produit livré pour leur permettre de calculer leur rentabilité. Nous sommes plus qu’un simple site de e-commerce, notre objectif est d’apporter de la valeur. Nous avons d’ailleurs un service téléphonique, avec des experts agricoles, des ingénieurs agronomes joignables jusqu’a 22h pour répondre aux questions des exploitants. NN : Quels sont les grands projets du moment chez Agriconomie ? PP : Un des plus gros enjeux pour nous est de continuer à recruter des gens de talent. Nous grandissons rapidement et il nous faut des gens expérimentés pour gérer cette croissance. Nous venons pour cela de recruter un directeur marketing, ancien spécialiste du digital chez Yves Rocher et Etam. Nous développons également de nouveaux services. A l’heure actuelle, Agriconomie aide les agriculteurs à mieux acheter, demain nous allons les aider à mieux vendre et à valoriser leur production sur notre plateforme. NN : Quels sont les revenus potentiels pour le e-commerce dans le secteur agricole ? PP : Immense, les agriculteurs achètent pour 30 milliards d’euros par an, il s’agit du deuxième plus gros marché en France. Sachant que dans les autres secteurs économiques 15 à 20 % des achats se font sur Internet, le chiffre d’affaires attendu est colossal. D’ailleurs, nous avons de plus en plus de concurrents, cela montre qu’il y a un marché et que nous allons pouvoir nous développer et croître. Tous ces nouveaux arrivants vont nous aider à convertir les agriculteurs aux achats sur Internet, à les convaincre des gains potentiels, en temps et en argent. NN : Que peut apporter le numérique au secteur agricole ? PP : Cela leur permet de faire jouer la concurrence à plein. La distribution agricole est soumise à des zones de chalandise bien définies, or ces oligopoles maintiennent les prix assez hauts. Le digital apporte de la transparence et démocratise le processus d’achat. Plus globalement, de plus en plus de nos collègues lancent des outils de management de la donnée pour améliorer la rentabilité des exploitations. Chez Agriconomie, nous utilisons la data pour optimiser le parcours d’achat. Nous observons quels types de produits les agriculteurs utilisent le plus et en fonction du profil de leur exploitation, nous leur proposons alors ces produits au meilleur moment, afin de leur faire économiser de l’argent et leur éviter de faire face à une rupture de stock. NN : Pouvez-vous nous en dire plus sur l’association la Ferme digitale que vous présidez? PP : La Ferme digitale regroupe une multitude de start-up qui innovent dans le secteur agricole. Le but est de fédérer toutes les initiatives permettant un gain de productivité au sein des exploitations et de créer des synergies. Nous mettons également en place des partenariats entre les grand groupes et les start-up, une occasion pour les premiers de piocher des idées novatrices et pour les jeunes entreprises de proposer leurs services en direct. Nous voulons créer un modèle vertueux pour une agriculture plus pérenne tout en rapprochant consommateur et producteur. Alors que le métier d’agriculteur est très difficile, il a parfois une image troublée, notamment dans les villes. Les gens ne savent plus ce que signifie être agriculteur. Nous voulons aider à faire comprendre les enjeux de l’agriculture moderne. Les exploitants doivent de leur côté être à l’écoute des consommateurs, afin d’adapter leur offre. Le problème est qu’aujourd’hui beaucoup d’intermédiaires coupent la communication entre le producteur et le consommateur. Nous voulons recréer un lien direct entre eux, grâce à la Ferme digitale. Propos recueillis par David Rozec, drozec@nomination.fr